C’est facile de tomber amoureux de cette idée d’inconfort (mais si, vous savez, ce discours du développement personnel qui dit que pour grandir il faut aller là où ce n’est pas confortable). C’est facile aussi de l’utiliser comme une diversion.
Prendre des douches glacées, marcher sur un tapis de braises, sauter en parachute, d’appeler cette personne qui vous fascine mais que vous n’osez pas approcher. C’est spectaculaire et mignon, on va là où l’adrénaline est la plus forte, là où la peur est la plus épidermique. Là aussi où elle est le plus dépourvue de sens.
L’inconfort qui fait grandir n’est pas celui du spectacle, c’est celui qui se manifeste quand je marche dans ma peur, quand j’agis avec elle qui me serre le ventre, parce que c’est là qu’est le dépassement de moi. Ailleurs, c’est agiter de l’air, c’est faire un tour de montagne russe. La peur n’est pas liée au danger, si ce n’est à celui de découvrir ce dont je suis capable quand je fais sauter les freins artificiels avec lesquels j’ai pris l’habitude de fonctionner.
Vieux discours rayés en forme d’automatismes, vieilles limites arbitraires que j’ai oublié de faire sauter. Avancer avec l’inconfort c’est entrer dans ma responsabilité et dire : je suis capable du meilleur en moi si seulement je m’y autorise. Je peux être productif, créatif, généreux, organisé. Apporter du sens, apprendre, transmettre des choses utiles, aider mes frères et sœurs humains à s’affranchir de leurs propres limites arbitraires. Je peux faire du bien, libérer de la souffrance, apporter de la joie, pas en voulant sauver les autres (ils n’en ont pas besoin) mais en offrant mon authenticité et ma vulnérabilité à ceux qui ont envie de résonner avec elle.
Et je suis prêt à sacrifier mon confort d’aujourd’hui pour mon épanouissement de demain, parce que tout s’arrêtera dans quelques décennies, et qu’après il sera trop tard. Si je veux contribuer à la hauteur de mes capacités, c’est aujourd’hui que cela se passe. Avec audace. Et tant pis si je froisse quelques sensibilités en passant. Et tant pis si je m’écorche les genoux.
La vie est une histoire de résilience dans laquelle le but n’est pas de ne jamais tomber, c’est de se relever. Ni vite, ni tôt, mais dès que l’on en a la force. Se relever. Encore et encore et encore, jusqu’au bout. Et tant mieux si l’on cesse de chuter, et tant mieux si l’on chute. Ce n’est ni bon ni mauvais d’échouer, ce n’est que la mesure objective d’un désir réalisé ou pas encore réalisé. Ce n’est qu’une information qui dirige l’action suivante: essayer autrement ou passer à autre chose.
Pas facile. C’est pour ça qu’on a besoin de courage.