[CDD] Les états de l’écriture

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Reader,

Je termine de coanimer 4 séances d’ateliers de 3 heures sur la thématique « Le clown et l’écriture » avec le Théâtre du Chapeau. C’était une expérience enrichissante à de nombreux niveaux.

Celui qui m’intéresse aujourd’hui c’est la question des états de l’écriture.

Le clown est un personnage de théâtre qui ne vit que pour et par les états émotionnels qui le traversent. Tout ce qu’il fait, tout ce qu’il voit, tout ce qu’il expérimente, toutes ses relations, font naître en lui une réaction instinctive, brute, qu’il partage avec le public et qui informe ses réactions.

C’est une version exacerbée de ce que nous faisons lorsque nous jetons nos personnages dans des situations pour encourager leur transformation.

Nous les jetons dans l’arène et demandons : comment ça leur fait ? où est-ce que ça les touche ?

C’est ainsi que progressent les histoires.

Et pour l’auteur ?

Pour l’auteur c’est différent.

Les états que nous traversons servent rarement à nous rapprocher de notre objectif (finir le livre). Souvent, même, ils nous en éloignent.

Nous nous sentons fatigués par le travail d’écriture de la journée et nous disons : « ça ne sert à rien de continuer ».

Nous relisons une scène dont nous sommes fier et nous pensons : « je suis génial, les mots coulent à travers moi sans effort », et le lendemain, quand la production se révèle plus laborieuse, nous croyons que c’est un problème. Nous suspectons le projet d’avoir pris une mauvaise direction, alors que c’est juste notre expérience de la pratique qui diffère.

Certains jours, nous n’arrivons pas à produire et nous construisons toute une histoire autour du fait que nous ne savons plus faire, que n’avons jamais su faire, que l’écriture c’est pour les autres, pas pour nous.

Et une infinité d’autres états entre ces extrêmes, de la dissipation à la perte de concentration, de la fascination pour un détail à la dispersion dans une vision trop générale de l’histoire.

Ces états, tous ces états, sont normaux.

Aucun n’est extraordinaire.

Aucun n’est, à lui seul, le révélateur de ce qui fonctionne ou ne fonctionne pas dans notre pratique ou notre projet.

Prenons ces états pour ce qu’ils sont : des vagues d’émotions et de sensations liées à notre contexte et à une myriade de facteurs dont un bon nombre n’a rien à voir avec l’acte d’écrire.

Des vagues fugaces, temporaires, animées par un rythme de va et vient dont la fréquence évolue avec les saisons, les phases de la lune et les mouvements telluriques.

Pas un discours sur notre compétence.

Pas un commentaire de notre psyché sur la qualité de notre projet.

Plutôt quelque chose comme la météo de votre pratique. Un jour il fait beau, un jour il pleut. La météo ne dit rien de vous. Elle peut vous affecter, mais ne vous concerne pas directement.

Alors bien sûr, si certains attitudes se répètent de manière trop systématique (par exemple une soudaine envie de changer de projet à chaque fois que vous atteignez la moitié d’une histoire), ça vaut le coup d’explorer davantage ce qui vous arrive à cet endroit-là, mais le comportement et l’état sont deux choses différentes.

Vous pouvez bloquer et vous sentir mal. Comme vous pouvez bloquer et rester indifférent.

L’une des pistes pour atteindre la productivité dont vous rêvez, c’est d’atteindre ce détachement par rapport aux états qui accompagnent l’écriture.

« Détachement » ne signifie pas que vous ne ressentiez plus rien. C’est simplement que vous avez la capacité à ne pas prendre vos états personnellement. Vous pouvez être agacé par votre projet mais ne pas en tirer un commentaire sur votre pratique ou votre compétence ou la validité de votre projet.

Les clowns apportent cette distance en nommant leurs états pendant l’écriture et en s’interrogeant après coup : « qu’est-ce que ça me fait d’avoir eu du mal à écrire ? ». Si, au moment de la lutte intérieure entre le besoin de se concentrer et la difficulté à maintenir le cap, la réponse peut être « c’est horrible » ; après coup, une fois le cahier refermé, le constat peut être « c’était fun ! » ou « je m’en moque ».

Oui, « c’était fun », parce que l’expérience de l’écriture et une forme de jeu, un moment que l’on s’offre à soi-même d’exploration de notre imaginaire et des histoires qu’il contient, et des émotions qu’il porte et nous propose.

Même si c’est parfois exigeant, parfois rageant, même si parfois ça n’est pas fluide, et même quand c’est fluide et que ça nous régale, ce que nous cherchons, ce n’est pas une expérience unique, toujours la même, toujours limpide, c’est la richesse de tout ce que vivre l’écriture nous offre.

C’est comment écrire, l’acte même d’écrire, met en exergue notre capacité à vivre, c’est-à-dire à ressentir une multitude de choses, à être traversé par toute un dégradé de sensations et d’images et même, parfois, n’être traversé par rien d’autre qu’un vide désespérant et s’en réjouir.

Pouvez-vous vous entraîner cette semaine à distinguer l’expérience des états que votre pratique vous permet de vivre des discours que vous portez sur ces états ?

Pour gagner en détachement et gagner en légèreté et en jubilation d’écriture.

Anaël Verdier

PS : Le mastermind vous offre un espace où partager votre expérience de la pratique avec d’autres auteurs en activité, et de les entendre parler, eux-aussi, de leurs expériences et de leurs états et de ce que ça leur fait et de comment ils rebondissent et surfent sur leur pratique. Normaliser ce que vous vivez en constatant que pour les autres, c’est pareil, vous aide à en faire une expérience normale, neutre, puis jubilatoire.

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Si vous voulez travailler avec moi, plusieurs options :

  1. Si vous êtes sensible aux décors, apprenez comment ils peuvent vous ouvrir les portes de votre intrigue et de vos personnages. En vous concentrant sur les détails d’un lieu, vous pouvez donner vie à toute une histoire.
  2. Le mastermind s’adresse aux auteurs qui veulent apprendre, par la pratique, avec les contraintes de leur vie, sans faux-semblants ni fantasmes des conditions idéales de l’écriture. Une page à la fois, vous apprendrez à reconnaître les étapes de votre processus créatif, et vous les apprivoiserez.
  3. Si vous préférez entrer dans l’histoire par les personnages, apprenez comment leurs paradoxes, plus que n’importe quel élément de caractérisation visible, leur permettra de laisser une trace indélébile dans l’imaginaire de vos lecteurs.

Et toujours mon podcast et ma chaîne Youtube pour approfondir votre relation à votre écriture.

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