Manifeste 2022 – 2

Je veux écrire des histoires qui viennent de moi, de ma curiosité, de ce que j’aime dans le monde. De ce qui m’intrigue ou me révolte. Je ne suis pas révolté par beaucoup de choses, sauf, peut-être par le fait d’être dans un monde dont les codes m’ont longtemps échappé – et continuent de m’échapper.

Je préfèrerais ne pas trop utiliser les réseaux sociaux. Je n’ai pas grand chose à partager sous ce format-là. Je crois qu’on s’en fout. Ce n’est pas ce que les gens qui utilisent les réseaux sociaux cherchent. Ils veulent de quoi scroller. Vite fait. C’est quoi mon identité de réseaux sociaux ? Ma terrasse tous les jours. Mes recherches d’histoires. Mes doutes. Mes espoirs. Mon sentiment d’impuissance. Je ne sais pas si on peut publier ses galères sur les réseaux sociaux ou si c’est le monde de la pensée positive. Dans les romans, tu peux écrire sur les galères d’un personnage. Dans un post facebook, si ce n’est pas de l’info ou du militantisme, pas trop j’ai l’impression.

Ce qui m’intéresse, ce qui me semble le plus, disons, chargé de sens, c’est de raconter pour normaliser. De dire : voilà la vie. C’est plein de galères, c’est plein d’imprévus et d’inconnues, et de bordel. C’est comme ça, pas d’affolement, on peut quand même y trouver son compte. Faut arrêter de fantasmer sur les grosses voitures et les penthouses, et savoir se satisfaire de peu. Il y a aussi le bordel autour, le monde qui change, le réchauffement climatique, les virus, les gens qui s’exilent dans l’espoir d’une vie meilleure, ailleurs.

Tout ça, c’est la vie aussi. Le monde comme une grosse poubelle, la Terre comme une poule en batterie, les intelligences artificielles, la recherche de l’immortalité. Toute cette folie de l’humain qui est fascinante, qui ouvre sur nos penchants d’exploitants, sur notre fragilité et notre goût du confort, sur notre angoisse de la mortalité et du manque, sur notre fuite en avant aveugle et c’est pas grave, l’humanité disparaîtra, c’est tragique mais c’est comme ça.

En 10.000 ans, on aura réussi à ruiner une planète. Un miracle. Une beauté exceptionnelle, ruinée à cause de notre besoin de toujours plus de confort. Je ne suis pas outré, je me sens impuissant et relativement indifférent. Après tout, notre passage dans l’univers n’est qu’une anecdote, une presque anomalie. On se donne une importance folle alors qu’on n’est rien, ou pas grand chose.