M’éloigner de ma vie, prendre la distance physique et émotionnelle, un recul concret, incarné. Me voir dans de nouveaux regards. Me projeter dans d’autres vies. Rencontrer d’autres morceaux d’existence.
Pour rester au contact de moi-même et questionner mes habitudes – non pas en théorie mais en les changeant dans la réalité, en en vivant d’autres.
Pour mieux me rencontrer grâce à ma rencontre avec le monde. Pour plonger dans un monde rempli d’opportunités de croissance et d’apprentissage, rempli de sources de curiosité. Libre des routes que je choisis d’emprunter, affranchi de mes craintes, dans un pur accueil de la réalité.
Plus tôt ce mois, j’ai vécu l’un des plus importants soulagements de ma vie en donnant mon préavis à Bordeaux. Je me sépare de la ville pour alléger mes jambes, laisser mon corps flotter au gré des souffles existentiels.
Des rencontres en multiplication de moi. Avoir l’audace d’oser vivre, d’oser être inscrit dans le monde, en pleine prise avec lui et avec moi.
Écrire des livres, de temps en temps, pour vibrer à la découverte d’histoires-synthèse de mes élans de vie, comme lorsque j’ai relu quelques pages oubliées de Shaolin Lovers et ressenti une décharge d’amour et de joie, un allègement du cœur, expérience de lâcher-prise mêlée de celle de m’être envoyé un message en forme de cadeau à travers le temps.
Me relire six mois plus tard et être frappé par la justesse des émotions inscrites sur le papier par une version de moi dont je n’ai plus qu’un évanescent souvenir.
Partir. S’il n’y n’avait pas l’Enfant, je ne rentrerais pas. C’est clair, net, sans appel.
J’irais le temps nécessaire compléter la gamme de mes expériences pour augmenter ma vie. J’irais sur les routes sans durée déterminée.
Je repousse l’heure du retour parce qu’ici – Ailleurs – c’est moi que je retrouve alors que là-bas, depuis plusieurs mois déjà, je ne me (re)connais plus. Non que j’aie changé, mais la stabilité que j’ai fabriquée masque ma profonde agitation: il est temps de partir.
Temps, maintenant, de reprendre la route. De renouer avec la continuité de mon être en mettant un terme à la parenthèse d’immobilité de ces dernières années.