22.6.23

Le final de la saison 3 de Staged m’a pris par surprise et complètement chamboulé. La qualité d’écriture qui a amené à ce climax, admirable. La qualité du jeu et de la réal. L’attention aux détails. Le build up et le payoff émotionnel… L’épisode partait sur un humour de malaise. L’impression d’un truc brouillon parfaitement orchestrée. Rien n’est léché mais tout est impeccable, jusqu’à la séquence post générique.

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Au réveil je me faisais cette remarque que l’on a intériorisé, à force d’écouter les commentateurs s’exprimer sur les œuvres des uns et des autres, en tant qu’artistes on a intériorisé cette idée qu’une œuvre est faite pour être commentée. Je me bats contre cette tendance en moi.

D’un côté j’ai besoin que mon travail « rencontre » un public si je veux manger. De l’autre, je ne peux pas travailler correctement s’il y a tout le temps un regard imaginaire penché par-dessus mon épaule.

Il y a des tas de raisons qui peuvent pousser quelqu’un à aimer ou ne pas aimer une œuvre, et une bonne partie de ces raisons n’a rien à voir avec l’œuvre elle-même ou avec sa qualité. Certains trucs bricolés avec amour sont bien plus marquants et réussis que des grosses productions qui rentrent dans tous les codes.

D’ailleurs l’artiste n’est-il pas d’abord celui qui joue avec les codes pour inventer quelque chose de nouveau ? Qui en teste les limites ? (vs le technicien qui, lui, les applique avec minutie) — elle n’est pas toujours évidente, cette danse entre art et technique.

C’est le sujet de cette saison 3 de Staged. Et plus encore, cette saison est une invitation au risque, à oser ce qui n’est pas évident, à sortir de ce que l’on connaît, même si ce que l’on connaît est rassurant. Encore plus si c’est quelque chose que l’on a commencé à un moment où on avait besoin de réconfort.

« I think we need a break », lance Michael.

Faisons-la, cette pause avec ce qui est familier, avec ce qui est sûr, avec ce qui nous rassure.

En acceptant d’écrire 100 chapitres/épisodes d’un tout nouveau projet en 5 mois, j’ai fait un pas dans cette direction. Comme lorsque j’ai décidé d’enregistrer un épisode de podcast par jour. Puis quand ces deux projets sont entrés en collision, il a fallu faire un choix. J’ai choisi le roman.

« We need a break ».

Une pause de podcast.

Heureusement que j’ai fait ça d’ailleurs, vu que je burn out au moins une fois par semaine sous la pression créative de l’autre projet.

C’est une bonne chose. Ce n’est pas un de ces burn out qui paralyse. C’est juste un épuisement naturel lié à une performance intense et intensive et à ma petite endurance. Je remonte aussi vite en selle que j’en suis tombé, je m’époussette et la cavalcade reprend.

Je me laisse cette note à moi-même : Staged, l’épisode 6 de la saison 3, te cueille où il faut comme il faut, complètement par surprise. C’est aussi un bon rappel du fait qu’une œuvre demande un engagement de son public. Il faut du temps pour amener une charge émotionnelle comme celle-ci et ce temps passe par des moments moins confortables et moins agréables, des moments où tu te demandes ce que tu regardes. La récompense n’en est que plus délectable.