Traverser le tunnel

Lentement, patiemment, progresser chaque jour d’un mètre ou dix, selon le terrain, selon l’envie, la fatigue. Avancer sans relâche ni éclat, ne rien attendre. Accepter, de plus ou moins bonne volonté, l’absence d’horizon. Chaque jour rythmé par la nécessité de progresser. Il se peut que le tunnel n’ait pas de fin. Ça ne fait rien. Avancer vaut mieux que de baisser les bras. Peu à peu s’alléger du superflu, retrouver le sens du nécessaire. Il y a quelque chose d’apaisant dans la répétition aveugle du quotidien. Dans le rituel : se lever, avancer, se coucher.

Et puis un jour, quand on a oublié d’y croire, quand on n’y pense plus, l’aveuglante lumière de la sortie.

Le proverbial bout du tunnel.

On ne sait plus faire avec la lumière. On est tenté de ralentir la cadence, histoire de prolonger ce que l’on connaît. Le calme de la traversée. Dehors, à la lumière, n’est-ce pas l’agitation, la bousculade ? Ce sont les souvenirs que l’on en a gardé.

Pourtant, persévérer. Avancer pas à pas, se préparer à sortir en plissant les yeux pour filtrer le soleil à l’éclat trop vif. Petit à petit, l’envie de prolonger le séjour des profondeurs laisse place à l’anticipation de l’extérieur. Sans précipitation, on avance moins par réflexe, on trouve dans la démarche l’élan de l’impatience curieuse.