23.5.23

Je ne suis pas satisfait de ma vie en ce moment et je ne sais pas ce qui pourrait me rendre satisfait.

En vrai je me dis que ce n’est pas grave de ne pas être satisfait.

Que je peux accepter de ne pas l’être.

Ce n’est pas un problème que d’être insatisfait, pas plus que la souffrance (liée au désir (cf. Bouddha)) ne l’est. Le problème vient de ce que j’en fais un problème. Je pourrais dire « voilà où j’en suis objectivement. Et voilà ce que je ressens (de l’insatisfaction) ». Simple constat.

Mais je suis là à me dire « je ne devrais pas être insatisfait » alors que… pourquoi ne pas l’être ? c’est amusant d’être insatisfait, ça fait plein de choses dans le corps. Des sensations. Des frissons. Des tensions de ressort qui attend de jaillir.

Non, le problème c’est de ne pas avancer vers mes objectifs. D’avoir conscience de mes échéances et des points ambitieux que je veux atteindre, et d’avoir l’énergie de la distraction, de la dispersion (probablement parce que j’ai trop de priorités en compétition).

Une part de moi voudrait ne rien faire. S’allonger au soleil et laisser passer les jours.

Et une autre voudrait briller. Recevoir des accolades de la société.

Et une autre souhaite qu’on la laisse tranquille.

Une partie voudrait être déjà morte. L’autre voudrait être immortelle.

Note que ces deux envies sont deux manières d’échapper au passage du temps, à l’insupportable urgence qui accompagne la vie.

Trop courte, elle ne laisse que peu de place à la flânerie, au temps perdu. Si l’on veut finir sa vie en se disant que l’on a bien vécu [mais peut-être que vivre, c’est déjà bien vivre. (Peut-être que bien vivre, c’est s’affranchir des ambitions fabriquées socialement. {On n’est pas là pour « devenir quelqu’un » mais pour profiter de l’instant, profiter des saisons et du soleil. Pas pour s’acharner à faire quelque chose de son temps sur Terre mais simplement pour traverser ce temps. Il n’y a pas d’autre accomplissement à souhaiter que celui d’avoir été.})]

L’humain est une créature paradoxale. Faire tenir ces paradoxes exige une attention et une volonté constantes. On ne maintient pas le paradoxe sans effort parce que le mental veut les résoudre. Il dit « c’est comme ça », à l’exclusion de tout ce qui contredit « ça ». Il dit « je suis ambitieux » et exclut toutes les parts de soi qui aspirent à la détente et à envoyer balader les accolades. Il ne sait pas dire « je suis ambitieux et paresseux et satisfait et frustré et libre et contraint… »

C’est pourtant là qu’est là clé à toutes nos peines. Dans l’acceptation de notre nature paradoxale. « Je désire et je ne désire pas. J’aime et je n’aime pas ». En même temps.

L’absolutisme nous a coupés de la richesse de notre être.

D’une part de notre richesse devrais-je dire.

Du nuancier de nos expériences.

On ne devrait pas chercher à résoudre nos paradoxes mais les embrasser avec encore plus de détermination.

Oui, je suis paradoxal.

Oui, je suis inconstant.

Cette inconstance trouve mal sa place dans la société très ordonnée très carrée très optimisée et déterminée dans laquelle j’ai été jeté. Je ne me reconnais pas dans cette recherche de constance. Je m’y plie quand je suis fatigué de me justifier pour mes inconstances. « Mais tu avais dit que… » « Oui, et j’ai changé d’avis ».

Lundi je dis « j’irais bien voir ce film ». Jeudi, quand tu me proposes une séance, je dis « je n’ai pas envie de le voir ».

Je me force à la constance uniquement parce qu’elle facilite la communication. Mais c’est un masque, un artifice.

Projet Arthur 34 ½ /100
Dehors : le pollen me rougit les yeux.