Si je meurs cette nuit

Je laisserai derrière moi des centaines d’histoires inachevées.
Des histoires d’amour, des histoires d’argent, des préoccupations, une pastèque entamée et un melon.
Un fils au coeur brisé d’être orphelin, un père jaloux de ne pas être parti en premier.
Une licorne qui aurait voulu guérir mes blessures.
Une jolie veuve qui pleurera un deuxième amour parti trop tôt.
Une sœur en sursis.
Une carrière en faux départs.

J’aurai aimé, j’aurai contemplé, j’aurai ressenti, j’aurai craint, j’aurai vécu.
Assez peu de regrets.
J’ai écrit plusieurs des livres que je voulais écrire.
J’ai aidé plusieurs des personnes que je pouvais aider.
J’ai aimé les femmes que je voulais aimer et quitté celles que je n’aimais plus assez.
J’ai affirmé mes idées, défendu mes valeurs avec générosité.

Je n’aurai pas fait assez des choses que je voulais faire.
Je partirai avec le coeur rempli de regrets.
Pour la fortune que je n’aurai pas amassée.
Pour les livres que je n’aurai pas écrits.
Pour tout ce que je n’aurai pas transmis.
Pour tout ce que je n’aurai pas changé.
Pour toutes les guérisons que je n’aurai pas finies.
Pour toutes les chaînes que je n’aurai pas dénouées.

Si je meurs cette nuit, ce sera d’avoir vécu sans filet
Si je meurs cette nuit, ce sera de n’avoir pas économisé
Pour le trajet de retour, d’avoir brûlé mes navires.