Art

Vaut-il mieux une vie riche qui ne produit aucun art ou une vie misérable qui produit de l’art ?

L’art est pour moi central.

La recherche des émotions et du sens, le travail de la forme et du fond.

L’art se tient à la marge. Il invente de nouvelles formes, de nouvelles dynamiques entre l’émotion et la compréhension, il traduit le monde à travers de nouveaux prismes.

via GIPHY

Parfois je me demande s’il est possible pour l’artiste de ne pas vivre dans la misère. Son talent, c’est de douter, d’être animé par une insatiable curiosité qui, même si ses circonstances sont parfaites, le maintiennent dans un état de constante insatisfaction.

Parfois je me demande s’il est possible pour l’artiste de ne pas vivre dans la richesse. Lorsqu’il est connecté à lui-même, lorsqu’il s’abandonne à la source de son art, l’artiste trouve un public, son public. Et l’amour coule vers lui.

Où est l’art ?

L’art est dans celui qui le produit. Dans sa recherche constante de dépassement. La démarche artistique elle-même est artistique. La réinvention de sa propre vie, l’expérimentation du regard (comment voir mieux le monde ? Comment mieux le traduire ?), le questionnement incessant et la redéfinition de son propre travail, de sa méthode. Il y a, chez l’artiste, un besoin de nouveauté. Explorer de nouvelles formes plutôt que de se répéter. Jouer avec le monde, avec la matière, avec ses outils.

L’art est dans celui qui le reçoit. C’est lui qui est touché par l’oeuvre. Sans spectateur, qu’est-ce que l’art sinon une bouteille lancée à la mer avalée par une baleine ?

L’art est-il dans sa création ou dans son effet ?

Recherche

Je ne définis pas l’art comme une recherche esthétique. Je crois que le beau n’est qu’un effet secondaire de l’art. Il n’a pas besoin d’être là.

L’art existe lorsque la forme déroute le mental, lorsqu’elle l’accapare pour que l’œuvre puisse frapper en plein dans le noyau des émotions.

via GIPHY

Lorsque la forme est parfaite, lorsqu’elle captive l’esprit analytique et que le noyau émotionnel est pur, agité, chaotique, vivant, vibrant, y a-t-il art ou seulement excellence artisanale ?

Ces catégories n’ont pas d’importance. L’art est une recherche. Il cherche à se définir en se faisant. Ces questions font partie du processus mais elles ne le limitent pas.

Nécessités

Il faut manger, maintenir un toit au-dessus de sa tête et la tête sur les épaules surtout lorsque l’on a charge d’enfants. L’artiste a ses moments de disparition. Le monde s’éloigne de lui. Lui-même s’absorbe dans son monde intérieur, oublieux de tout sauf de l’oeuvre.

Trouver une solution.

Il faut de l’argent. Pour vivre les expériences les plus variées possibles. Pour aller à la rencontre du monde.

Pour cela, l’artiste est aussi technicien. Il sacrifie parfois à l’artisanat. Il abandonne ses recherches formelles et revient au classicisme. Parce qu’il est un excellent technicien, il crée des œuvres qui le nourrissent.

Sans frustration, peut-il y avoir de l’art ?

La frustration crée de la tension. La frustration pose un problème. L’art trouve une solution.
Une vie sans frustration offre-t-elle un élan suffisant à l’urgence artistique ?

via GIPHY

L’urgence artistique vient de ce que le monde déroute l’artiste. Il est en manque de sens alors il le crée. Si tout est en place, s’il y a du sens, comment (et pourquoi) continuer à faire de l’art ?

Un artiste qui ne se réinvente pas dans chaque oeuvre est comme une langue qu’on ne parle plus, un artiste mort. Pour se réinventer, il faut qu’il soit frustré par ce qu’il a produit. Il faut que l’œuvre soit éloignée de l’intention de l’artiste. Ou qu’il ait un autre champ de curiosité à explorer.

Ou que le champ qu’il est en train d’explorer le lasse. Quand cette lassitude devient frustration, alors sa recherche s’oriente vers de nouvelles questions. Maintenant que j’ai épuisé ce que j’avais à dire sur l’amour, de quoi puis-je parler ? Quelle autre zone d’incompréhension perturbe mon sommeil ?

Il y a toujours de quoi être dérouté. Le monde est une manne pour l’artiste.